Chéreau, un persécuteur persécuté
Vendredi 11 décembre 2009
Après “l’arroseur arrosé” voilà au cinéma “le persécuteur persécuté”, thème du dernier Chéreau “Persécution” qui, une fois de plus, détonne dans le paysage cinématographique français Le réalisateur a écrit avec Anne-Louise Trividic un scénario qui mêle à la fiction un épisode de sa propre histoire : “celle d’un garçon qui m’avait persécuté et qui avait décrété que j’étais l’homme de sa vie”. Daniel, Sonia et “le fou”, en proie à la dépression, la démence, l’incompréhension et le rejet, avancent dans ce véritable kaléidoscope de la souffrance contenue et de l’inextricable hiatus entre le désir de l’un et la vie de l’autre. Avec une impudeur très personnelle, Chéreau a osé peindre à l’écran une “façon d’aimer que je connais bien, quelque chose que je déteste en moi”. Duris au sommet de son art, Anglade dont la fragilité et la force sidèrent et Charlotte Gainsbourg qui ne cesse pas de nous étonner, voilà un casting d’enfer pour cette œuvre iconoclaste d’un Chéreau compatissant et sans concessions. Si les histoires d’amour de ses films étaient plus faciles, sans persécuteur ni persécuté, ce ne serait plus du Chéreau.
Le dramaturge, comédien et metteur en scène Roger Planchon, âgé de 77 ans, est décédé mardi à Paris d’une crise cardiaque. “Il a travaillé jusqu’à la dernière minute en se battant pour continuer à faire du théâtre…C’était sa passion, sa vie” a souligné son fils. Michel Audiard disait : ” L’idéal quand on veut être admiré, c’est d’être mort”. Roger Planchon n’avait fort heureusement pas attendu ce jour. En faisant un théâtre critique et populaire, il était considéré, comme un des metteurs en scène les plus importants depuis Jean Vilar, c’est peu dire. Il mettait en scène aussi bien des classiques que des auteurs contemporains comme Arthur Adamov ou Michel Vinaver. En 1952, il crée le Théâtre de la Comédie, à Lyon . En 1957, il se voit confier la direction du Théâtre de la cité ouvrière de Villeurbanne. En 1972, ce dernier devient le Théâtre de la Cité avec le Label TNP, dont il prendra la direction. Figure importante de la décentralisation théâtrale, il fut aussi le réalisateur de Dandin d’après Molière , de Louis enfant roi et de Lautrec. En 1990, il fonde Rhônes-Alpes Cinéma et ouvre en 2002 un studio de cinéma de 902 m2 transformable en Théâtre Studio de 700 places. En réalisant 18 mises en scènes pour 3200 représentations, il a inspiré depuis 50 ans de grand metteurs en scène comme Rey ou Patrice Chéreau. Cet homme de grand talent et de passion est parti en travaillant.